Nous ne sommes pas condamnés , Dieu merci , à déplorer souvent , trop souvent ! les erreurs et la laideur de l'art contemporain , d'authentiques artistes nous éblouissent encore .....
En ce mois de mai riche en rappels religieux , retrouvez ici un artiste et l'exposition que lui a consacrée le Musée de Fourvière d'art religieux à Lyon en 2011
Trésor de la cathédrale de Chartres
" Goudji , des mains d'or et de feu "
Goudji , connu sous ce seul prénom , est né en 1941 en Géorgie , dans une famille cultivée de tradition chrétienne orthodoxe . Il accomplit des études d'art complètes aux Beaux Arts de Tbilissi , puis de Moscou, et endure tout ce qu'impose la vie en Union soviétique : appartements communautaires , suspicion , pénurie de tout , y compris du matériel nécessaire au travail artistique , et la contrainte de servir le régime , sans pouvoir quitter le territoire .
"Il n' y avait en ce temps que deux solutions pour un citoyen soviétique... dit-il .Se
faire aplatir par le système , au détriment de soi , ou résister , au risque d'être brisé ."
Des évènements marquent sa vie : d'abord, dans sa treizième année sa découverte du Christ dans une église , alors que , baptisé clandestinement , il n'a pu recevoir d'instruction religieuse , interdite.
Puis en 1969 son mariage à Moscou avec une jeune femme qui travaille à l'Ambassade de France , Catherine , fille d'André Barsacq , lui-même né en Crimée , qui fut le metteur en scène des pièces de théatre de Jean Anouilh.
Apres cinq ans de démarches difficiles , Georges Pompidou réussit à faire venir à Paris l'artiste , qui assure y être né en 1974 , aphorisme qui illustre ce changement de vie éclatant . Paris et la liberté l'éblouissent , puis notre patrimoine , que Catherine lui fait découvrir en un tour complet de France : toutes nos cathédrales , les ruines de Jumièges , le Mont Saint Michel le marquent . La découverte de ses oeuvres le font inviter ensuite dans tous les pays d'Europe ." Voir ces merveilles que je ne connaissais pas me remplit d'un bonheur sans pareil " , En 1978 il reçoit notre nationalité .
bracelet dents de loup lapis lazuli
Goudji avait rencontré de vieux dinandiers , un Grec et un Arménien , qui avaient fui les Turcs, et appris auprès d'eux l'utilisation de leurs outils , notamment le façonnage des bigornes . Echappant en France aux stéréotypes imposés par le Parti , il peut enfin réaliser un rêve : créer des bijoux . Hubert de Givenchy , séduit par la beauté de ces pièces inspirées de l'antiquité de l'époque byzantine ou paleo chrétienne , organise une exposition dans une galerie rue Saint Honoré , puis d'autres admirateurs , dont Gérard et Sophie Capazza , (qui ont restauré en galerie d'art une ferme abandonnée à Nançay , le village d'Alain Fournier en Sologne ) ,J.Santrot , C.Bernard .
A Conques , on peut admirer ce reliquaire aérien
Au début Goudji ne travaille que le cuivre , plus tard il apprivoisera les pierres précieuses ,
dont les noms chantent autant que les couleurs : lapi-lazuli, jaspe, calcédoine pyrite, cristal de roche, tourmaline , aventurine , sodalite, agate, améthyste , dont il assortit les teintes subtiles au vermeil ou à l'or , dont elles irisent les contours , ou à l'argent massif pour en illuminer les reflets ; qui ne rêverait de ce bracelet carolingien ?
Peuvent figurer parmi les bijoux les épées d'académiciens qui lui furent demandées , dont celle d'Alain Finkelkraut, dont le choix a pu combler les amis des animaux domestiques et nos artisans de France profonde , rappel en somme de mugitusque boum de Victor Hugo
Mais l'aspiration profonde de l'artiste, exprimer sa foi , n' est pas encore exaucée ; depuis sa découverte d'une fresque représentant le Christ marchant sur les eaux du lac de Tibériade , dans une église où il s' est glissé en trompant la vigilance de ceux qui en interdisent l’accès , il veut créer " des objets de culte , uniques , dans un matériau noble pouvant défier le temps , objets de" beauté à la gloire de Dieu ". Grâce à F.Mathey il obtient du Comité français de l'Art sacré la commande de mobilier liturgique pour une exposition à l'abbaye de l'Epau; remarqué par l'archiprêtre de notre Dame , qui devient évêque de Chartres , il réalise pour la cathédrale autel , cathèdre, lutrin , ambon, offerts par les dons des fidèles , le mécénat du CLAL , ou de particuliers , tel ce joailler de Lyon donateur de l'émeraude de la Croix de l'autel de Chartres .
Les commandes affluent , dont celle des Capucins qui offrent à S.S Jean Paul II , lors de la béatification du Padre Pio , cette sobre croix de procession , le reliquaire présenté par le moine et le chandelier de l'acolyte
Rational de Jean Paul II par Goudji, en médaillon
L'exposition de Fourvière réunit beaucoup de ces œuvres d'art et de foi prêtées par églises et cathédrales , où elles magnifient les symboles religieux .Citons , pour nos lecteurs qui aimeraient contempler ces superbes objets liturgiques : la Grande Trappe de Soligny , l'évêché de Blois , l'abbaye de Sept Fons , la cure d'Etampes , la basilique de Lourdes , Paray le Monial ,la cathédrale de Chartres , Notre Dame de Paris , l'église de Fribourg en Suisse , le monastère des Capucins de San Giovanni en Italie .
Mais les objets usuels : vasques , vases , hanaps , aiguières ..
prennent entre ses mains une vie mystérieuse , celle d' un monde où se révèlent beauté et
se révèlent beauté et
peut être celui que l'oiseau va conduire à son chevalier , et à la quête du Graal .....
Mais sans doute avons-nous besoin de la licorne ,de l 'aigle et du Taureau
non pas ennemis , mais ensemble vigilants, pour réveiller nos forces que ce siècle matérialiste et niveleur tente d'étouffer .
L'inspiration ne quitte jamais Goudji ." Pour être orfèvre , il faut être aussi un peu forgeron, "dit-il , et c'est un travail physique , qui accomplit ce que l'esprit a conçu et que l'œil vérifie sans cesse : forme , équilibre des volumes , harmonie des couleurs . "Maître d'art " , il reçoit des élèves pour le leur transmettre, mais se désole qu'ils ne sachent pas dessiner , ni ne connaissent l'histoire de l'art , savoirs sans lesquels il n'y aura que des "spécialistes sans curiosité ", donc pas de relève ....
Certes , mais c'est le génie qui donne à ces pièces si particulières leur vibrante sérénité ou l' irrésistible élan du Roi Cerf-Volant .
Des expositions ont consacré dans le monde entier cette œuvre de passion et de lumière .
fbr 19 mai 2018
lCouple de licornes vigilantes