La batailles d'Hernani a duré un mois , et ce fut un choc passionnel .
Notre "Hernani " n'est pas aussi spectaculaire , mais tout aussi passionné.
Plus que jamais nous dénoncerons ce qui est abandon , ou pire , trahison de notre patrimoine et de notre culture .
C'est à dire le déni de notre identité .
Nouveaux articles
Le Festival d'Aix en Provence , avec le mariage de Figaro , se prend il pour celui d'Orange ?
Est ce Mozart qu'on assassine , ou Beaumarchais , ou les deux ?
"Programmes et promesses , faites le tri (la culture selon F. Hollande et A. Filipetti ) " Une euthanasie anticipée , celle de notre langue "( la charte promue par les Verts ).
Comment , en la cathédrale d'Amiens toute en lumiéres , à Notre Dame de Paris , on retourne aux sources de l'art et de la religion
Spectacle "Amiens, la cathédrale en couleurs"
la Couronne d'épines - "cachée" à Notre-Dame de Paris ! Visible une fois l'an !!
comment , à Rochefort sur Mer , l'Hermione revit
Larguez les amarres ! La seconde naissance de L'Hermione
En ce 6 juillet 2012, les amateurs d'Histoire et de marine ont les yeux tournés vers Rochefort-sur-mer, en Charente-Maritime. Depuis près de 20 ans en effet, bordage après bordage, rivet après rivet, un navire du XVIIIe siècle revoit le jour dans une des vieilles formes de radoub du port : l'Hermione.
Remontons le temps
Le 21 mars 1780, amarrée aux quais de Rochefort, l'Hermione accueille à son bord un major général de 23 ans, Gilbert Motier, plus connu sous le nom de marquis de La Fayette.
Plein d'ardeur, le jeune homme a rejoint le mouvement d'opinion favorable à l'indépendance américaine. S'il a fortement contribué à convaincre Louis XVI d'envoyer un corps expéditionnaire lutter contre les Anglais, sa jeunesse ne lui permet pas de se porter à la tête de ces troupes.
Connu en France pour son rôle pendant la Révolution, il est devenu de l'autre côté de l'Atlantique le symbole des liens d'amitié entre les États-Unis et notre pays.
Il était logique que cette expédition parte de Rochefort : dissimulé dans les terres près de l'embouchure de la Charente et éloigné des côtes anglaises, le site avait été choisi en 1666 par Louis XIV pour construire un nouvel arsenal maritime. Il s'agissait d'assurer la puissance maritime de la France
Incité à faire «vite, beau et grand», Colbert bâtit de toutes pièces une ville, ignorant les mises en garde qui s'inquiétaient de la présence de marais. Effectivement, des sommes folles vont être englouties pour stabiliser ces sols mouvants, au point que Louis XIV se serait écrié : «Rochefort est sûrement pavé d'or !». Plus grave : l'air malsain décime les habitants, tuant en 1780 près de 3.000 personnes. Les hôpitaux de la Marine, où s'installe en 1722 la première école de médecine et chirurgie navale du pays, ne peuvent venir à bout du fléau.
L'arsenal, pourtant, se développe avec notamment la magnifique Corderie royale, dont les 374 mètres de long, établis sur une plate-forme posée sur des pieux, permettent la confection d'encablures de 200 mètres.
Mais décidément, Rochefort n'est pas le port idéal : il faut tirer les navires à bras d'homme jusqu'à la mer ! L'arsenal est supprimé en 1927, la Corderie incendiée par les Allemands en 1944. Il faudra attendre les années 1970 pour que la ville redécouvre son passé maritime et se relance dans la construction d'un seul navire, mais d'exception : l'Hermione.
Fille de Ménélas et de la belle Hélène, Hermione était pour les Grecs la petite-fille de l'Océan. Quel beau nom pour un bateau plein de noblesse ! Mis à l'eau en 1779, ce bâtiment est une frégate, c'est-à-dire un navire à trois mâts avec un pont de batterie, très apprécié pour sa solidité et sa vitesse. Il fut notamment choisi par Bougainville puis Lapérouse pour effectuer leurs voyages autour du monde.
Destinée à la guerre, l'Hermione accueille 26 canons de 12 (leur diamètre en centimètres) et commence d'ailleurs rapidement à s'illustrer contre les corsaires qui naviguent au large de nos côtes.
Mais c'est grâce à La Fayette que notre frégate entre dans l'Histoire en permettant au jeune officier d'aller annoncer au général Washington l'envoi de renforts français.
Après avoir eu l'honneur de recevoir à son bord le tout nouveau Congrès américain, elle enchaîne pendant deux années les combats contre les Anglais avant de regagner son pays. Revenue d'une dernière campagne dans l'océan Indien, elle finit tristement sa carrière au large du Croisic le 20 septembre 1793, échouée sur des rochers dans l'estuaire de la Loire. En 1984, des plongeurs découvrirent son épave, reposant sur le plateau du Four. Le lion qui composait sa figure de proue n'a pas refait surface, mais il revit aujourd'hui à Rochefort et a retrouvé toutes ses couleurs.
Petite visite à bord en 1780
44 mètres sur 11 : les hommes qui embarquent à bord de la frégate savent que ce n’est pas pour un voyage d’agrément! 316 matelots, soldats, charpentiers, voiliers, canonniers vont devoir s'entasser tout en faisant de la place à «la viande sur pattes» constituée par une quinzaine de moutons et des dizaines de poules.
La nourriture est en effet le nerf de la guerre : il faut que l'équipage soit nourri correctement pour éviter fatigue et maladies, en particulier le scorbut, dû au manque de vitamine C. Pas moins de 30 tonnes de biscuits et 84 000 litres d'eau sont ainsi nécessaires au maître coq pour assurer une traversée de 6 mois.
Le confort est spartiate pour les marins qui partagent les plats en s'installant où ils peuvent, et dorment chacun (depuis 1776) dans son propre hamac ou «branle» (d'où l'expression «branle bas !» en cas de combat) installé dans le faux-pont, sombre et humide.
Vêtus de leurs propres «hardes», ils sont originaires des côtes et ont souvent commencé comme ces mousses âgés d'une dizaine d'années
À l'arrière de la frégate, les 8 officiers bénéficient de logements particuliers, même si la chambre du commandant est elle aussi encombrée de canons ! Accompagnés de domestiques qui rappellent leur origine noble, ils ont reçu une formation théorique et portent l'uniforme. Ils donnent les ordres et tiennent leur journal de bord, en essayant d'ignorer les moqueries des matelots qui s'en donnent à cœur joie lors des «charivaris», ces chants improvisés qui leur donnent du courage pour manœuvrer le lourd cabestan !
1992 : quelques membres du Centre International de la Mer et élus de la ville de Rochefort créent l'Association Hermione-Lafayette. Dans leurs têtes trotte une idée un peu folle : reconstruire un navire du XVIIIe siècle. Les vieux murs de la Corderie royale ne les y incitent-ils pas tous les jours ? Ils savent aussi que d'autres projets ont été menés à bien dans le monde, comme les répliques de l'Endeavour de James Cook (1994, Sydney) ou celles des navires de Christophe Colomb (1992, Palos de la Frontera).
Mais le défi reste de taille ! Il s'agit de créer un véritable spectacle permanent autour de cette reconstruction, d'inciter le public à s'approprier le chantier et de faire revivre le passé maritime de la ville.
Le choix s'arrête vite sur l'Hermione qui rappelle un épisode fort de l'amitié franco-américaine. En quelques années, les passionnés et les bonnes volontés des deux côtés de l'Atlantique vont permettre au rêve de devenir réalité, non sans remous et écueils !
Ce fut d'abord aux historiens de prendre les choses en main et d'aller fouiller dans les archives pour retrouver les plans de notre navire. Mas ils avaient disparu. Ceux du navire sœur, la Concorde, sont repris . Le CRAIN (Centre de Recherches pour l'Architecture et l'Industrie Nautique) dessine les premières épures, transmises à une entreprise spécialisée dans la restauration des charpentes des monuments historiques.
La suite n'est que la réplique des étapes d'un chantier de construction du XVIIIe siècle : pose de la quille puis des éléments de la coque, calfatage, installation de la structure interne (ponts, escaliers, cloisons, lest...), fabrication des canots, décoration extérieure... Enfin à flot, l'Hermione quittera sa forme de radoub le 6 juillet 2012 pour parader devant Rochefort avant de rejoindre son nouveau chantier où elle finira sa mise en beauté en recevant ses mats et cordages. Mais nous ne sommes plus au XVIIIe siècle : au lieu de moins d'un an à l'époque, plus de 15 auront aujourd'hui été nécessaires pour mener à bien le chantier lui-même.
Avec toutes nos techniques modernes, construire un navire du XVIIIe siècle peut sembler un jeu d'enfant. Mais pour les concepteurs du projet, la facilité doit s'effacer devant l'Histoire. Dès le début, il était acquis que cette réalisation ne se ferait qu'avec les moyens de l'époque, ou du moins en s'en rapprochant le plus possible. Charpentiers, forgerons et autres voiliers devaient retrouver les gestes de leurs ancêtres.
Mais si, autrefois, la main-d’œuvre expérimentée ne manquait pas, seulement quelques artisans ont aujourd'hui le savoir-faire indispensable, faute de transmisson et de vocations .
N'oublions pas également les difficultés rencontrées : où trouver les 400.000 pièces de bois, en particulier les pièces courbes qui donneront leur forme au navire ? Comment empêcher ce bois, tout au long des années de travail, de sécher trop vite ? Comment alléger le navire ? Les bûcherons ont donc couru les forêts à la recherche des perles rares, des brumisateurs ont été installés, fibres synthétiques et clous en acier ont été acceptés.
On ne plaisante pas avec la sécurité ! Mettre à l'eau un bateau digne de Louis XVI ne doit pas faire oublier que les règles ont changé. Parce que l'Hermione ne pouvait naviguer sans l'autorisation des organismes de contrôle, il fallut faire des concessions. Tout d'abord, aucune sortie et entrée de port n'aurait pu être accordée si le navire n'avait bénéficié de l'aide d'un moteur et d'hélices pour éviter tout accident de manœuvre et risque de naufrage en pleine mer. Pour la même raison, chaînes et ancres modernes mais aussi GPS et donc électricité seront ajoutés.
Pour les 30 marins confirmés attendus, au lieu des 316 nécessaires à l'époque, sanitaires et surtout équipements de sauvetage et matériel de protection, comme des rambardes supplémentaires pour éviter toute chute, sont prévus. Quant aux 26 canons, leurs affuts et roues n'ont pu être construits en orme, aujourd'hui disparu .
- Jean-Marie Ballu, L'Hermione, l'aventure de sa reconstruction, éd. du Gerfaut, 2007.
- Emmanuel de Fontainieu et Yves Gaubert, L'Hermione. De Rochefort à la gloire américaine, éd. de Monza, 2002.
A bientôt
Le cercle Hernani